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Injonction de payer : créances concernées, procédure et points de vigilance

Les différentes créances concernées :
Cette procédure s’applique à un large panel de créances.

La nature de la créance :

Une créance contractuelle ou résultant d’une obligation statutaire :
Il s’agit de toutes les sommes stipulées au contrat (contrat de vente, de prêt, de louage) ou dont le recouvrement est prévu par les statuts d’une société ou d’une association.
Exemples : factures impayées, achat, emprunt bancaire…
A noter qu’aucun plafond ni plancher n’est imposé s’agissant du montant de la créance.
Encore faut-il que le montant de la créance soit déterminé.

Les créances résultant de l’acceptation ou du tirage d’une lettre de change, de la souscription d’un billet à ordre, de l’endossement ou de l’aval de l’un ou l’autre de ces titres ou de l’acceptation de la cession d’une créance professionnelle :
En raison de la rareté de ces situations, l’injonction de payer pour ces motifs est tombée en désuétude.

La prescription de la créance :
La créance ne doit pas être prescrite, ni sur le point de l’être. Ce point est important car le dépôt de la requête n’est pas interruptif de prescription, seule la signification de l’ordonnance portant injonction de payer provisoire permettra d’interrompre la prescription.

Les différentes prescriptions :
Créances de droit commun : 5 ans,
Créances entre commerçants : 5 ans,
Assurances, professionnels : 2 ans
Loyers : 3 ans

Attention ! Cette procédure ne peut être utilisée aux fins de recouvrer le paiement d’une pension alimentaire ou d’un chèque sans provision car il existe des procédures spécifiques de recouvrement.

Les différentes étapes procédurales :
Plusieurs étapes sont à suivre pour valider votre procédure. Suivez le guide.

Les juridictions compétentes :
Comme pour les autres procédures, il faut respecter la compétence matérielle et la compétence territoriale.

Compétence matérielle :
Le président du tribunal judiciaire : compétence générale pour les créances de nature civile
Le juge des contentieux et de la protection : en matière de loyers impayés, crédits à la consommation
Le président du tribunal de commerce : compétent quel que soit le montant de la créance dès lors qu’elle est de nature commerciale.

Compétence territoriale :
Le tribunal territorialement compétent est celui du domicile du débiteur ou de son siège social, sous réserve de la compétence exclusive du tribunal du lieu où est situé l’immeuble en matière d’impayé de charges de copropriété.

Dépôt de la requête :
Le créancier doit dans un premier temps rédiger une requête qui sera remise ou adressée au greffe du tribunal compétent par le créancier ou tout mandataire, contenant des mentions obligatoires.

La désignation du créancier :
Pour les personnes physiques : nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur
Pour les personnes morales : forme, dénomination, siège social, organe qui la représente légalement

La désignation du débiteur :
Pour les personnes physiques : nom et domicile
Pour les personnes morales : dénomination et siège social

Objet de la demande
Le montant de la somme réclamée accompagnée d’un décompte des différents éléments caractérisant la créance et son fondement
La date et la signature du créancier

La requête doit être déposée en double exemplaire et accompagnée de l’ensemble des documents justificatifs, sous peine d’être déclarée irrecevable (facture impayée, contrat, bon de commande, devis, relevés de compte), ainsi que l’accusé de réception du courrier de mise en demeure infructueux.

L’ordonnance rendue par le juge :
Sachant que la procédure est non contradictoire, le juge rendra sa décision sans même entendre les arguments du débiteur, d’où l’intérêt pour le créancier de déposer une requête complète.

Il existe 3 cas de figure.

Acceptation totale :
Dès lors que la demande lui paraît fondée, le juge rend une ordonnance portant injonction de payer pour l’intégralité de la somme réclamée.

Acceptation partielle :
Le juge rend une ordonnance portant seulement sur une partie de la somme réclamée. Le créancier aura alors une option :
Soit il reconnaît perdre une partie de sa créance : il pourra procéder à la signification de l’ordonnance et accepte ainsi de ne jamais recevoir la différence.
Soit il refuse et procède par les voies de droit commun.

Ordonnance de rejet :
Lui paraissant non fondée, le juge rejette la requête. Afin d’obtenir le paiement de sa créance, le créancier pourra procéder par les voies de droit commun (assignation).

Cette procédure est prévue par l’article 1405 du Code de procédure civile, et permet le recouvrement de certaines créances de la façon la plus simplifiée, rapide et la moins onéreuse possible. Elle est destinée à procurer à tout créancier un titre exécutoire à l’encontre de son débiteur afin de lui permettre la mise en œuvre de mesures d’exécution.

Après une première phase amiable demeurée infructueuse (lettres de relances, envoi de factures impayées…), le créancier doit dans un premier temps procéder à l’envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception au débiteur, le mettant en demeure de payer les sommes dues, dans un délai fixé par le créancier. Ce n’est qu’une fois le délai écoulé et en cas de non-paiement que la procédure d’injonction de payer prend tout son sens.

Dérogatoire au droit commun, cette procédure est dans un premier temps non contradictoire : l’ordonnance portant injonction de payer est obtenue sur requête sans que le débiteur n’en soit avisé. Toutefois, en cas d’opposition par ce dernier à l’ordonnance portant injonction de payer provisoire, celui-ci provoquera l’ouverture d’un débat contradictoire devant le magistrat. Dans le cas contraire, le créancier pourra valablement faire apposer la formule exécutoire sur son ordonnance. Celle-ci constituera alors un titre exécutoire, lui permettant dans un second temps de pratiquer les mesures d’exécution adéquates par l’intermédiaire d’un Huissier / Commissaire de Justice.

De l’ordonnance provisoire à l’ordonnance définitive :
A ce stade, l’ordonnance portant injonction de payer n’est que provisoire.
Le créancier devra alors faire appel à un Huissier / Commissaire de Justice pour signifier l’ordonnance au débiteur, ainsi que la requête, et ce dans les 6 mois de sa date, à défaut elle sera non avenue.

Une fois signifiée, l’Huissier / Commissaire de Justice retournera au créancier l’acte signifié qu’il conviendra d’adresser au greffe afin de voir apposer la formule exécutoire après expiration des délais de recours.

Le débiteur dispose d’un délai d’un mois pour contester l’ordonnance par voie d’opposition auprès du tribunal l’ayant rendue.

A défaut d’opposition, la formule exécutoire sera alors apposée sur l’ordonnance et lui permettra de produire tous les effets d’un jugement contradictoire. Le créancier pourra confier son dossier à un Huissier / Commissaire de Justice pour qu’il procède aux mesures d’exécution contre le débiteur et lui permettre d’obtenir son dû.

Désireux de contester le bien fondé de la créance ou encore la régularité de la procédure, le débiteur dispose d’un délai d’un mois pour former une opposition à compter de la signification de l’ordonnance, dès lors qu’elle lui aura été signifiée à personne.

Dans le cadre d’une signification non à personne, le débiteur conserve la faculté de former opposition jusqu’à l’expiration du délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne ou suivant la première mesure d’exécution rendant indisponibles en toute ou partie les biens du débiteur.

L’opposition permettra de rétablir un débat contradictoire entre le créancier et son débiteur. Les parties seront alors convoquées à une audience par le greffier. L’audience faisant suite à l’opposition du débiteur est soumise aux formalités procédurales ordinaires.

Dans certains cas, on se retrouve confronté à des difficultés de transmission qui exigent l’intervention d’un Huissier / Commissaire de Justice. Les difficultés sont les suivantes quand on veut envoyer un courrier :

  1. La lettre recommandée avec avis de réception (LRAR) n’offre pas de garantie de contenu : il est possible d’envoyer une lettre vide, afin d’obtenir un accusé de réception. Cette situation particulièrement malveillante se produit régulièrement.
  2. La LRAR n’offre pas de garantie de célérité : dans la civilisation numérique, le facteur temps est essentiel. Seul l’Huissier / Commissaire de Justice peut signifier une lettre n’importe où en France en moins de 3H de délai avec une garantie de date et de contenu.
  3. La LRAR n’offre pas de garantie de date. Quelle date faut-il retenir ? La date d’envoi de la LRAR ? La date de première présentation ? La date de signature ? La date de retour de l’accusé de réception ?
  4. La LRAR n’offre pas de garantie de réception. Que faire si la LRAR est présentée mais que le destinataire ne va pas la chercher ?

Autant de questions qui se posent et qui montrent la faiblesse de la notification par LRAR.

L’alternative que nous proposons est la SIGNIFICATION DE LETTRE. En moins de 3H à compter de la réception de votre courrier, nous pouvons signifier n’importe où en France (par l’intermédiaire d’un confrère de notre réseau si en dehors de notre ressort de compétence) une lettre dont le contenu sera garanti. Aux yeux de la loi, le destinataire sera réputé avoir eu connaissance de votre missive.

Cette procédure offre une sécurité juridique maximale. A noter cependant pour vos correspondances particulièrement urgentes, nous sommes tenus de respecter les horaires légaux : pas de signification entre 21H et 6H du matin.

S’agissant du coût, il est variable en fonction de l’urgence de la mission, mais avec l’augmentation des tarifs de la LRAR, nul doute qu’il s’agit d’une stratégie particulièrement compétitive.

Est-ce que l’on peut négocier des délais de paiement avec un Huissier / Commissaire de Justice qui vous poursuit ? La réponse est oui… et parfois non !

Vous ne bénéficierez pas systématiquement de délais de paiement chez votre Huissier / Commissaire de Justice
Pourquoi ? Et bien parce qu’en réalité ce n’est pas l’Huissier / Commissaire de Justice qui vous octroie des délais de paiement, mais le créancier. L’Huissier / Commissaire de Justice n’a pas le pouvoir de forcer le créancier à vous octroyer des délais. C’est pour cela que si vous faites une proposition, l’Huissier / Commissaire de Justice a l’obligation de la répercuter au créancier.

En théorie, le créancier a donc tout pouvoir pour accorder des délais. En théorie seulement. En effet, l’Huissier / Commissaire de Justice dispose d’un réel impact dans le processus de négociation, et il peut inciter le créancier assez fermement à vous octroyer ces délais. Dans la pratique, on constate que l’Huissier / Commissaire de Justice détient la réalité du pouvoir dans la plupart des dossiers, car les créanciers ont tendance à écouter et à faire confiance à l’étude.

Quelle est la durée des délais que vous pouvez obtenir ?
Le principe : il n’y a pas de limite technique aux délais que l’Huissier / Commissaire de Justice peut vous accorder.
La pratique : les textes de loi prévoient que le juge peut étaler la dette sur un délai maximum de deux ans, et l’Huissier / Commissaire de Justice aura tendance à ne pas dépasser cette échéance. Autre limite, infranchissable celle-là : la prescription du dossier.

Que devez-vous faire si vous êtes poursuivi ?
On constate malheureusement que l’attitude la plus habituelle venant de la part du débiteur consiste à ne pas affronter la situation, et à attendre que les choses se fassent d’elles-mêmes. C’est une erreur. Vous aurez plus de facilité à négocier un accord en prenant les choses en amont, et en n’hésitant pas à nouer le contact avec l’Huissier / Commissaire de Justice qui vous poursuit.

Focus loyers impayés et saisie conservatoire

L’obligation principale d’un locataire est avant tout de régler ses loyers et charges. Toutefois, à défaut, le bailleur dispose de plusieurs solutions afin d’en exiger le paiement, qu’il s’agisse d’un bail d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989 ou encore d’un bail commercial sur le fondement de l’article L145-41 du Code de commerce, mais encore de tout autre bail écrit de louage d’immeuble.

La procédure d’expulsion est une procédure longue, qui nécessite le respect de plusieurs actes judiciaires dans le but d’obtenir une décision de justice prononçant l’expulsion de son locataire.

Elle débute par la signification d’un commandement de payer les loyers ouvrant à son débiteur un délai de deux mois pour s’exécuter sur le fondement d’un bail d’habitation et d’un mois en matière commerciale, faute de quoi la clause résolutoire insérée au bail pourra jouer. Il conviendra dans un second temps, et une fois les délais légaux expirés, d’assigner son locataire en expulsion devant le juge des contentieux de la protection.

Le risque est évidemment que la situation d’insolvabilité de son locataire persiste voire même ne s’aggrave. C’est pourquoi le bailleur a tout intérêt de faire pratiquer une saisie conservatoire sur les biens de son débiteur afin d’assurer son paiement.

Conformément à l’article L511-2 du Code des procédures civiles d’exécution, une saisie conservatoire peut être pratiquée en vertu d’un contrat écrit de louage d’immeuble.
« Une autorisation préalable du juge n’est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d’un titre exécutoire ou d’une décision de justice qui n’a pas encore force exécutoire. Il en est de même en cas de défaut de paiement d’une lettre de change acceptée, d’un billet à ordre, d’un chèque ou d’un loyer resté impayé dès lors qu’il résulte d’un contrat écrit de louage d’immeubles ».

L’Huissier / Commissaire de Justice ainsi mandaté pourra alors mettre en œuvre une saisie conservatoire sur les comptes bancaires ou au domicile du débiteur le cas échéant. Le locataire ne pourra alors plus disposer des sommes d’argent immobilisées par l’acte de saisie et elles seront reversées au bailleur à l’issue de la procédure.

A noter que le bailleur doit obligatoirement saisir le tribunal compétent dans le mois suivant la saisie en vue d’obtenir un jugement condamnant le débiteur aux sommes réclamées. A défaut, la saisie sera nulle et ne produira aucun effet.

Outre le fait d’assurer un paiement en fin de procédure, la saisie conservatoire peut également permettre une réaction du locataire défaillant.

Après avoir obtenu le jugement de condamnation à l’encontre de son locataire, le bailleur fera à nouveau intervenir son Huissier / Commissaire de Justice pour convertir l’acte de saisie et procéder au recouvrement des sommes dues.

Les contestations restent toutefois ouvertes au locataire, pouvant saisir le juge compétent et demander la condamnation du bailleur à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par l’acte de saisie. De plus, les frais de l’acte de saisie conservatoire doivent être avancés par le bailleur.

On le voit, le bailleur dispose ici d’un moyen de pression redoutable sur le locataire indélicat, en pouvant lui saisir ses biens et notamment ses comptes bancaires, avec un effet de surprise souvent total.

A noter que cette procédure est possible pour tous les types de baux, que ce soit en matière civile ou commerciale : en effet, le texte vise une situation particulièrement large du bail écrit de louage d’immeuble.